Écoutons ce que les politiques de tous bords (et probablement de nombreux pays) disent depuis trente ans : "nous allons lutter contre le chômage". En effet, le chômage est considéré comme une plaie pour l'économie, une tare pour ceux qui y sont réduits, un puits sans fond pour le budget de l’État etc. Le chômage c'est pas bien et il faut donc, naturellement, lutter contre. Cette approche s'appuie sur différents postulats tels que : pour vivre il faut des ressources économiques et pour avoir des ressources économiques il faut, en général, travailler pour "gagner sa croûte" et "faire bouillir la marmite". Évidemment, la question du chômage ne concerne pas les rentiers pour lesquels la problématique de la ressource économique ne se pose pas. Le truc, c'est que pour travailler, il faut avoir un emploi et que bizarrement, il n'y a pas d'emploi pour tous ceux qui souhaiteraient en avoir. C'est ballot !

Cela n'a pas toujours été comme ça. Durant l'après-guerre, une période de trente ans est considérée comme une période de "plein emploi", c'est-à-dire où les chômeurs se comptaient sur les doigts de la main. Ce sont les Trente Glorieuses. A l'époque, il fallait reconstruire le pays et il y avait donc "de quoi faire". Depuis, ce qui a été fait et fait, et puis on a modernisé les industries, l'agriculture, les services et finalement, ceux qui travaillent sont beaucoup plus productifs, par tête de pipe, que par le passé. Il y a donc moins de besoin et une meilleure productivité, donc forcément, on a besoin de moins de "bras" pour satisfaire les besoins, d'où le manque d'emploi.
Pour lutter contre ce problème, il n'y a pas trente-six solutions (selon les milieux autorisés) : d'une part, baisser le coût de la main d’œuvre, ce qui permet de produire moins cher et de vendre plus, et d'autre part, accroître les besoins, a grand renfort de publicité, d'effet de mode, etc. On a développé le concept du jetable, réduire la durée de vie des objets manufacturés, favorisé le gaspillage alimentaire. En contre-partie, on a généré des quantités de déchets qui doivent être traités, ce qui crée des emplois ! Quel bonheur !
Et pourtant, il y a toujours plus de chômeurs. Faudra-t-il toujours plus gaspiller, jeter, détruire pour avec une bonne raison de produire de par ailleurs ? Il est clair que ces solutions, avancée depuis plusieurs dizaines d'années ont fait long feu. En réalité, il n'y a pas d'autre moyen acceptable de réduire le chômage qu'en réduisant la productivité des travailleurs et en partageant le temps de travail. Les travailleurs pourraient imaginer être intermittents du chômage, ou avoir encore plus de temps libre (temps partiel). En fait, ça se fait déjà beaucoup et de plus en plus (on parle de travail précaire), mais cette situation subie est anxiogène ce qui fait que peu de personnes la recherche. Et puis travailler moins, c'est aussi gagner moins alors bon... ce n'est pas très motivant. Alors quelle solution ?
On le voit bien, le problème est celui de la ressource économique. Il suffirait de supprimer cette contrainte ou de la réduire pour que l'on accepte de devenir des chômeurs heureux, disponibles pour s'engager dans des activités bénévoles souvent plus enrichissantes humainement que son emploi. D'ailleurs les chômeurs heureux existent déjà : on les appelles des retraités ! On va me dire : mais si on peut être un chômeur heureux, qui va accepter de travailler ? Et surtout qui va ramasser mes poubelles, faire le ménage chez moi, se coltiner toutes les corvées ? Forcément, les métiers à faible reconnaissance seront un peu délaissés, mais qu'importe : on aura le temps de faire le ménage, les courses, de cuisiner soi-même puisqu'on travaillera tous peu. La belle vie quoi !